Qui dit popularité dit aussi horaire chargé. En dehors des cours, Andrew n’avait pas une minute à lui, ce qui ne lui déplaisait pas, bien au contraire. Il y avait toujours quelqu’un qui traînait dans la salle commune, toujours un soir où ses potes et lui squattaient la Pimentine jusqu’à se faire virer parce qu’ils s’y pointaient peu de temps avant l’heure de fermeture, bien souvent. Andrew accumulaient sans cesse les sorties. Il connaissait littéralement tout le monde dans l’université, surtout les filles. Mani Leverenz, la demi-sœur de son pote Elias, lui reprochait de préférer la quantité à la qualité, ce qui le faisait bien rire. Andrew avait sa propre façon de gérer sa célébrité, et sans rejoindre l’opinion de Mani, il ne s’en sortait pas trop mal. Mieux que pas trop mal, même. Il était très doué aussi pour accueillir les nouvelles têtes.

* Les dirlos devraient me décerner une médaille, c’est clair *

C’est comme ça qu’il en était venu à faire la connaissance de Samantha, qu’il surnomma rapidement Samy. On reconnaissait Andrew à cette habitude qu’il avait de coller des surnoms à tout va. Il donnait l’impression d’être grand pote avec la totalité des élèves de l’université. L’inverse semblait tout aussi vrai puisqu’on entendait parler de lui de la bouche de tout le monde, le nom de McAllen n’étant inconnu de personne. Par contre, lui, ne savait absolument rien de Samy, à part qu’elle débordait d’énergie et d’envie de plaire. Comme toutes les premières années qui arrivaient à l’école, elle cherchait à se faire des relations, et lorsqu’Andrew la rencontra, ça n’avait pas l’air de beaucoup fonctionner. Elle haussait la voix, passait du coq à l’âne et adressait la parole à tous ceux se trouvant autour d’elle. Tant de bonne volonté, et personne pour l’accepter. Son comportement fit sourire Andrew qui s’empressa de venir à sa rescousse. Ravie que quelqu’un l’écoute plus d’une minute, ils discutèrent un moment avant de jouer une partie de ping-pong. Andrew enchaîna quelques blagues, puis il commença à parler du village à proximité du château, là où il traînait souvent. Samy ne tarda pas à démontrer son intérêt pour l’endroit, lui demandant sans l’once d’une timidité s’il voulait bien l’y emmener.

Le Plume sauta sur l’occasion et accepta volontiers d’un large sourire. L’ennui, c’était la présence de Thèdes à ce moment-là. Thèdes qui, amoureuse de lui, prenait bien évidemment mal le fait qu’il accepte les invitations à gauche et à droite. Andrew décida donc, comme elle le lui demanda, de ne pas sortir au village ce soir-là. S’il le fit, c’était parce qu’il jouait sur les mots. Obligé, quand on est l’un des Cinq Plumes, sinon on ne s’en sort pas. Andrew invita donc Samantha un autre soir, se disant mentalement que d’inviter une fille à un concert n’avait rien à voir avec inviter une fille au resto. Après ça, Andrew faisait fort dans les excuses. Depuis qu’il était à l’université, il avait déjà vécu des situations embêtantes avec les filles, mais cette année, il n’y allait pas de main morte. À croire qu’il ne réalisait pas qu’il allait droit dans le mur, à ce rythme-là. Il préférait demander pardon plutôt que demander une permission.

Ainsi, vêtu d’un pantalon noir et d’une chemise de la même couleur, Andrew arriva dans le hall d’entrée un sourire aux lèvres, de bonne humeur. Le groupe de musique sur la scène du Corn Flex ce soir, les Dark Goblins, passaient pour la troisième fois en cinq ans à Bourg-en-bière. Andrew les aimait bien, fan de Wiz Rock, le diminutif pour Wizard Rock, un genre musical dont les musiciens ne se donnaient pas en spectacle sur la scène moldue, soit à cause des effets magiques trop spectaculaires pour les non-sorciers, soit parce qu’ils ne voulaient qu’un public sorcier. Certains entretenaient encore quelques préjugés sur les moldus et leur univers. Arrivant près de Samy, Andrew remonta les manches de sa chemise pour dévoiler plusieurs bracelets de cuirs de style très rock n’ roll, un large sourire au visage.

" Plus que prêt ! Ce concert va être génial ! T’as vu un peu les bracelets, cool, hein ? Tiens, donne-moi ton bras deux secondes. "

Sans attendre que Samy réagisse, Andrew lui retira les bras du cou et détacha l’un de ses bracelets pour le lui attacher au poignet.

" T’as la classe, comme ça ! On y va ? "

Andrew appuya sa question d’un clin d’œil, tendant à Samantha son billet de concert.

" Et si tu me parlais un peu de toi, pendant qu’on marche ? "

Il poussa la porte d’entrée du château et fit signe à Samy de passer la première. Honneur aux dames, quoi. Andrew savait être galant. Il lui emboita le pas tandis que la porte se refermait derrière eux. Le jour tombait à l’horizon, et au loin, on pouvait déjà apercevoir quelques lumières en provenance du village.

Attentif aux informations que lui transmettait Samy, Andrew songeait qu’une mère qui épouse son propre fils, c’était pas très net, et un peu bizarre. Le genre d’histoire à faire un scandale dans une famille, c’est certain. Le mariage et les gosses, et puis quoi encore ? Le plus marrant, dans tout ça, c’était que les parents d’Andrew étaient mariés depuis plus de vingt-cinq ans et que d’aussi loin que pouvaient remonter ses souvenirs, pas une fois son père et sa mère ne se gueulèrent dessus. Les McAllen se fondaient dans le cliché du rêve américain, la clôture blanche et le chien en moins. Préférant passer outre le détail étrange de la mère épousant son fils, Andrew s’attarda sur ce coup du sort qui envoyait Samy dans les maisons à fortes têtes. C’est sûr, fallait pas se fier que sur la maison pour juger quelqu’un. Même qu’Andrew ne comprenait pas trop l’idée des maisons différentes au lieu de plusieurs dortoirs éparpillés sur les étages. À ce qu’il paraît, chez les moldus, c’était comme ça dans les universités.

" J’trouve que t’as pas mal de caractère, moi "

On était loin des Cinna frigides et aristocrates, mais Samantha possédait assez de personnalité pour s’imposer si elle le désirait. N’était-ce pas ce qu’elle fit dès son arrivée, adressant la parole à tout le monde en clamant une place parmi eux ? Andrew préférait cette attitude au comportement effacé et docile de certaines filles. Celles-là, dans le genre meuble de salon, on ne faisait pas mieux. Samy se disait elle-même exubérante. Elle avait sûrement un don pour exagérer les choses, son point de vue décuplant tout autour d’elle.

" J’étudie en Police magique, pour être Auror. Tu dois déjà être au courant pour les Cinq Plumes ? J’connais Alex depuis Salem, c’était le bon vieux temps, quoi ! Je voulais faire comme mon père, à l’époque, et entrer dans une ligue professionnelle de Quidditch. J’suis pas du genre à rester en place, j’ai besoin de bouger. Si jamais tu me cherches, tu peux tout de suite éliminer la biblio, en cinq années d’études j’crois que j’y suis allé un max de deux ou trois fois, faut bien bosser de temps en temps ! "

Il rit de sa propre remarque, très vraie. Le pire dans tout ça, c’est que lorsqu’il se pointa à la bibliothèque, il ne s’agissait pas d’un devoir à rédiger, mais alors pas du tout ! La première fois, c’était tout bonnement pour ramener un bouquin qu’il avait emprunté. Après ça, la bibliothécaire retint une colère noire contre un Andrew de dix-huit ans la gratifiant de son plus beau sourire en lui tendant le livre en question, en lambeaux, tout en offrant ses plus plates excuses, mais le chien du concierge lui avait couru après à cause d’Elias et blablabla et voilà, désolé. L’an dernier, il s’y planqua pour fuir une fille, une dénommée Antonia qui lui déclara son amour en plein milieu d’un couloir désert et silencieux. À proprement parler, il n’avait rien contre Antonia, à part qu’elle ressemblait à une gamine sortie tout droit d’une histoire d’horreur, le teint cadavérique, les longs cheveux noirs et le visage bourré d’acné. Pas le genre de fille avec qui Andrew avait l’habitude de traîner. Il paraissait parfois cruel, d’autres fois salaud sur les bords. Il ne le niait pas, et encaissait avec le sourire chaque insulte qu’une fille pouvait lui envoyer au visage, parce qu’il y avait les Cinq Plumes derrière.

" T’es déjà allée à un concert avant ce soir, au fait ? "

Avec six frères et sœurs, le budget familial devait être serré, quoi qu’au fond, Andrew n’en savait rien. Dernièrement, il avait apprit que Lauréline faisait partie d’une famille d’aristocrates alors qu’il n’aurait jamais cru la chose possible en la voyant agir. Peut-être que Samy, sous son attitude, cachait une famille fortunée vivant dans un palace gigantesque et pour qui la musique classique était la seule musique digne de ce nom. En même temps, le trois quart des Cinnacrow vivait dans des manoirs, alors bon.

" Hey, ça va ? "

Samy venait de virer cramoisi, carrément, ce qui incita Andrew à s’arrêter en chemin. Il lui adressa un sourire encourageant.

" Il fait assez chaud, tu veux arrêter manger un sundae ? "

Après tout, il était encore tôt, et le concert ne débutait pas avant une trentaine de minutes encore.

Inutile de précisez qu’à cet instant précis, la brunette sentait ses jambes devenir comme du coton. Elle mettait un pied devant l’autre avec un miracle digne de Merlin. La jeune Cinnacrow affichait un petit sourire stupide sur son visage d’enfant trop sage. En la présence d’Andrew McAllen, son cerveau fonctionnait au ralenti. Avait-elle déjà assistée à un concert ? Samantha regarda subitement ses pieds, cherchant aussi loin dans sa tête un concert qu’elle avait été voir. Son sourire stupide se transforma en sourire dût a un beau souvenir. Oui, elle avait déjà été voir un concert.

- Tu risques de te moqué de moi, mais le seul concert que je n’ai jamais vu, c’est lorsque j’ai emménagé au Canada. J’étais qu’une gamine et j’étais fan d’un groupe moldu nommé les Spice Girl. J’étais une vraie fan, limite groupie. J’avais peut-être six ans, mais j’étais en admiration devant ses filles trop géniales. Ma préférée s’était Baby Spice. Elle était blonde et j’étais folle. Mise à part ce groupe, jamais été dans un véritable concert.

Samantha se demandait pourquoi elle lui racontait sa vie, mais un sourire se porta à son visage. Elle était toujours une pivoine trop cuite, en s’imaginant dans les bras d’Andrew, fière comme un paon. Ce qu’elle serait heureuse et cette image lui donnait un air vraiment stupide, par ailleurs ce dernier lui demanda si elle allait bien. Sam remonta son regard vers lui tout en lui décrochant un sourire à faire fondre… une crème glacé. Le pôle-nord serait peut-être un peu exagéré. La demoiselle de dix-huit ans hocha la tête de façon affirmative, pourquoi est-ce que ça n’irait pas ? N’était-elle pas avec le garçon le plus séduisant de toute l’école ? D’un geste qui la surprit beaucoup, lorsque celui-ci lui proposa une glace, elle prit la main d’Andrew dans la sienne, le regard pétillant.

- Avec grand plaisir.

Samantha se sentait soudainement plus confiante, beaucoup plus sûre d’elle tout d’un coup. La jeune fille à la chevelure brune se demandait comment serait la vie dans les bras d’Andrew. Chose certaine, elle pourrait lui donner un amour sans limite à la hauteur qu’il le méritait. D’ailleurs, Samantha avait la prétention de dire qu’elle était certainement la seule à être capable d’aimer Andrew d’une façon aussi forte et aussi intense. Elle ne connaissait pas vraiment Andrew, mais le peu qu’elle connaissait de cet homme la rendait complètement amoureuse de lui. Sam se disait que parfois, si elle était tombée amoureuse aussi vite d’Andrew, c’était forcément qu’il était son âme sœur ou un truc du genre. L’amour de sa vie quoi ! Bon, c’était peut-être un peu trop, mais elle savait qu’Andrew représenterait toujours quelque chose de spéciale pour elle. Néanmoins, la demoiselle regarda son ami Plumentine, ne lui lâcha pas la main, s’il voulait l’enlever, il était assez grand pour rompre le contact aussitôt.

- Tu es un fan de musique, je crois ? Tu as un genre en particulier ? J’imagine bien que le groupe moldu que je t’ai parlé ne fait pas vraiment parti de ton répertoire n’est-ce pas ? À moins que tu caches un côté très féminin au fond de toi ?

Un petit rictus trop mignon se pointa sur son visage. La jeune fille voulait qu’Andrew se souvienne de ce rendez-vous comme étant l’un des meilleurs qu’il ait passé depuis longtemps. Sam avait décidée de jouer la carte de l’humour et de la gentillesse. Même si Andrew faisait parti du fameux groupe trop en vu des « Cinq Plumes », la demoiselle avait pour croyance que tout le monde tombe amoureux. Tout le monde tombe vraiment amoureux, lorsqu’il se laisse allez et elle était certaine qu’un jour Andrew éprouverait des sentiments à son égard. Comment est-ce que cela pourrait être autrement ? Elle était sympathique, certes, un peu boulet, mais en vieillissant, elle serait certainement moins boulet et plus femme non ?

Samantha regarda Andrew, se demandant à quoi il pensait à cet instant. Il s’imaginait peut-être entouré d’une bande de nanas trop canons qui le vénérait comme un Dieu ? Cela ne serait pas tellement différent des autres filles de SWYN, elle était peut-être nouvelle à la fac, mais elle n’était pas stupide. Chaque filles de l’école sans exception étaient amoureuses de l’un des Plumes. Pour sa part, au départ, elle croyait avec flasher sur Ted, au départ, pour finalement réalisé qu’elle était folle d’Andrew McAllen.

- Tu veux un sundae à quoi mon cher ?

Dit-elle en se trouvant en face de la crèmerie*. Samantha s’approcha du comptoir en attendant une réponse de son partenaire, tout en lui faisant un magnifique sourire.

{ Après deux mois, voici une réponse >.<
*Crèmerie => J'sais pas si on dit ça en France, mais c'est un endroit où on vent de la crème glacé ^^}

Parce qu’il n’affichait jamais d’air hautain et qu’il n’avait aucun préjugé sur les sangs mêlés ou les enfants nées de parents moldus, ceux qui le savaient oubliaient qu’il était venu au monde dans une famille de sangs purs, et les autres ne s’étaient jamais donnés la peine de poser la question, comme s’il était évident qu’il ne pouvait pas appartenir à ce lignage. À Salem, le temps d’un trimestre, Andrew avait choisi un cours optionnel en études de moldus, par curiosité. Il y avait appris le nom de leurs technologies, l’électricité par exemple, puis l’utilisation qu’ils en faisaient. Pour le reste, il savait seulement que les moldus se débrouillaient pour vivre sans magie, ce qui n’était pas plus mal, mais sans doute beaucoup moins pratique sur bien des points. Les joues toujours d’un rouge léger, Samantha lui raconta un souvenir d’enfance typiquement moldu, d’un ton naturel, sans gêne. Andrew ricana, amusé de la voir se lancer dans son histoire sans même redouter qu’il puisse se moquer d’elle. Ou plutôt, si, elle le redoutait, mais elle ne s’empêchait pas de raconter quand même. Vraiment, cette fille savait passer outre ce que les autres pouvaient penser d’elle, c’était tout à son honneur.

" Je vois l’idée "

La Cinnacrow leva un splendide sourire vers lui auquel il répondit aussi en souriant, parce qu’il n’y avait pas d’autre réponse possible. Elle lui attrapa la main, acceptant son offre de s’arrêter manger un sundae avant le concert. Andrew hocha la tête, laissant sa main au creux de celle de Samantha.

" J’connais pas le groupe dont tu parles, c’est sûrement moldu ? "

Sans cesser de marcher, il tourna son regard vers elle et ricana à son autre remarque.

" Ne fais pas la maligne, tu peux tout de suite oublier le côté féminin, je ne jure que par le rock n’ roll ! "

Peu importe l’époque, le genre évoluait sans se démoder. Andrew n’aimait pas que le rock, mais c’était celui qu’il préférait par-dessus tous les autres types de musique. Les Dark Goblins, le groupe qu’ils allaient voir en concert, jouaient d’ailleurs principalement du rock n’ roll, quoi qu’un peu trash, et quelques morceaux instrumentaux plutôt sympa. Andrew ne savait pas si Samantha était ouverte à la culture musicale de ce genre, mais il était sûr d’une chose, et cette chose était que ce soir, ils allaient s’amuser, tous les deux. Il l’avait décidé, point barre, c’était pas plus compliqué que ça. Ils arrivèrent au village de Bourg-en-bière, et firent quelques pas de plus pour arriver devant le kiosque du marchand de glaces, où un bedonnant à moustache noire qui ressemblant davantage à un chef de restaurant italien qu’à un glacier leur attendait, tout comme Sam, qu’Andrew réponde à la question.

" Vanille, mais j’hésite entre le coulis de mûre et celui aux bleuets, qu’est-ce que t’en penses ? "

En fait, il lui demandait de choisir à sa place, autrement il laisserait le hasard choisir pour lui. Andrew profita de l’instant où Samantha regardait les différentes saveurs de sundae sur le menu affiché au-dessus de leurs têtes pour sortir son portefeuille de la poche arrière de son pantalon et tendre un billet à Monsieur Moustache qui l’encaissa d’un ding sonore émit par la caisse enregistreuse à levier magique. Le jour où il laisserait une fille payer la note n’était pas encore arrivé. En même temps, ce jour n’arriverait peut-être jamais, à moins d’un argument plus que solide, ce qu’il ne pensait pas possible. Andrew tenait à cette habitude typique du gentleman, sans même savoir où il l’avait prise. Son père, pas trop du genre romantique, n’avait jamais vraiment invité sa mère au restaurant en tête à tête.

" Par contre, si t’es jamais allée dans un concert, j’devrais te prévenir, t’entendras comme en écho dans tes oreilles jusqu’à demain matin, un peu comme lorsque t’as la tête sous l’eau. "

Andrew lui lança un sourire mi-provocateur, mi-rieur.

" Toujours partante pour venir, même si ça doit te rendre sourde ? "

Il ne le demandait pas vraiment, c’était surtout pour la taquiner un peu, et pour revoir ce si charmant sourire se dessiner une nouvelle fois sur son visage.