Être une célébrité n’était pas chose facile tous les jours, et en tant que membre des Cinq Plumes, Andrew avait son lot de problèmes quotidiens. Le cas du jour se nommait Antonia, étudiante en journalisme dans le genre persistante. À vrai dire, elle ne voulait rien de moins qu’une entrevue avec lui, pour les besoins d’un soi-disant devoir. En temps normal, Andrew aurait accepté l’offre avec un enthousiasme débordant, mais il y avait une ombre au tableau ; Antonia était une Dorelly maigrichonne – donc pas de seins - au teint aussi blanc que celui d’un cadavre, la longue chevelure noire digne d’un film d’horreur n’aidant en rien, surtout pas remontée en chignon, on aurait dit une vieille fille décrépie. Bref, numéro suivant, et que ça saute ! Andrew, qui possédait quand même un minimum de tact, avait présumé un truc important à faire, mais Antonia, comme mentionné ci-haut, avait un caractère persistant, et n’en démordait pas.

" Rien que quelques questions, ça ne prendra qu’un instant. "

" J’peux pas, vraiment, j’suis déjà en reta- "

" Vois-tu quelqu’un en ce moment ? "

Andrew s’immobilisa et lança soudainement un regard suspicieux à Antonia qui virait rouge pivoine. Ah, c’était donc ça. Une déclaration. L’entrevue n’était qu’un prétexte, haha, et dire que pendant deux secondes il y avait cru.

" Tu peux faire quelque chose pour moi, Antonia ? "

La concernée, dont le visage irradiait à la mention de son prénom, hocha avidement de la tête, ce qui provoqua un sourire goguenard chez le Plumentine.

" Ferme les yeux… "

Lorsqu’elle s’exécuta, Andrew compta jusqu’à trois avant de prendre ses jambes à son cou. Bon, c’est sûr que vu comme ça c’était pas très sympa, mais il n’allait quand même pas dire à une moche qu’elle était moche, si ? Ainsi donc, dans le cas présent, pas de doute, la fuite était la meilleure solution. Seulement, Antonia tricha et ouvrit les yeux plus vite que prévu.

" Andrew, attends ! "

Ce qu’il ne fit pas. Dans sa course, il grimpa les escaliers menant au premier étage, Antonia sur les talons. Andrew tourna le coin du couloir, et avant qu’Antonia le rattrape, son regard fixa un moment la seule pièce à proximité qui pouvait lui servir de cachette : La bibliothèque. D’abord hésitant, se souvenant du regard avec lequel Octavie Mirbel l’acceuillait depuis qu’il avait rapporté un livre en lambeaux il y a deux ans, Andrew tira à contrecoeur la poignée en entendant les pas se rapprocher, et pénétra dans la bibliothèque en silence. Derrière son bureau, Octavie lisait un bouquin, visiblement très concentrée puisqu’elle ne vit pas la porte s’ouvrir. Afin de s’assurer de continuer de passer inaperçu, Andrew longea le mur, s’attarda derrière une colone et s’engouffra dans la premier section à sa droite, soit les sorts et enchantements.

Il marcha d’un pas rapide jusqu’au bout quand la porte d’entrée de la bibliothèque se referma, cette fois bruyamment. Alerté par l’éventuelle présence d’Antonia, Andrew s’enfonça plus loin dans les rayons. Jetant un regard en arrière, il cru voir une chevelure d’un noir de jais remontée en chignon, jura tout bas en se réfugiant derrière les immenses bouquins de symbolisme, ne réalisant que trop tard qu’une fille s’y trouvait, et qu’il venait littéralement de s’y coller face à face. Pour ne pas se faire repérer, il lui plaqua la main sur la bouche et l’adossa doucement contre l’étagère, levant un doigt de sa main libre devant sa propre bouche pour lui intimer de garder le silence. À ce moment, la silhouette au chignon noir arrivait à leur hauteur. Andrew retint sa respiration, et au lieu du regard suppliant d’Antonia, il croisa une paire d’yeux glacials auquel il répondit d’un large sourire idiot.

" Hey d’Orcy, comment va ? "

Mélite d’Orcy, choquée dans toute sa splendeur de tomber sur Andrew et une fille à moins de cinq centimètres l’un de l’autre dans un rayon, ne se donna pas la peine de lui adresser la parole, et poursuivit son chemin. Respirant enfin, soulagé d’avoir échappé à Antonia, Andrew se dégagea de l’autre fille, la considéra un court moment et se passa une main dans les cheveux avant de transformer son rire nerveux en sourire charmeur.

" Désolé hein, j’voulais pas t’agresser ni rien. J’espère que t’as pas pas trop flippé ? D'Orcy me donne des frissons dans l'dos, perso. "

[Réservé Aileine ! Et merci à d'Orcy pour sa généreuse apparition, t'es une vraie star ]

Regardant d’Orcy disparaître derrière ce qu’Andrew supposait être le rayon le plus ennuyeux que pouvait renfermer la bibliothèque, il hésita un instant à lui hurler qu’Elias lui passait le bonjour, mais la fille qu’il avait plaquée contre l’étagère lui demanda son identité, ce qui fut amplement suffisant pour détourner son attention. Il chercha à retenir son air surprit sous un sourire habile. Existait-il donc encore des filles dans cette école qui ne connaissaient pas son visage ? Le Plume ne pensait pas un tel miracle possible. Il s’en réjouit et serra la main que lui tendait Aileine.

" J’suis un peu des deux, mais tu m’as sauvé, t’es mon héroïne ! " Blagua-t-il d’un ton rieur. " Moi c’est Andrew, de Plumentine aussi. Marrant qu’on se soit jamais croisés avant. "

* Très marrant, même ! *

Il évita délibérément de mentionner son nom de famille. Les Cinq Plumes étaient si connus que beaucoup de filles avaient des préjugés – infondés bien évidemment – et se rebutaient à toute forme de conversation dès qu’elles apprenaient qu’elles avaient devant elles l’un des cinq briseurs de cœur de l’école. C’était pas le but. La réaction était abusive. Aux dernières nouvelles, les Cinq Plumes ne forçaient aucune fille à coucher avec eux. Même que dans le cas de certaines, Andrew reconnaissait lui-même que ce n’était pas que sexuel. Bon, il y avait toujours ces gourdes monumentales ô combien sexy sur qui se rabattre, mais Andrew se laissait rapidement de tant de facilité. À choisir, il préférait une fille avec un minimum de personnalité. Qu’on se le dise, il y avait certaines filles qu’il aimait bien, pour de vrai. Il ne traitait peut-être pas toutes les filles en princesses, et s’enfuyait dès que les choses devenaient trop sérieuses, mais il était loin d’être un monstre de cruauté. Cette paranoïa durait depuis trop longtemps. Un peu d’humour, que diable ! À croire qu’il n’y avait que Mani Leverenz pour piger un peu le truc. Toutes ces longues explications pour dire que là de suite, Andrew n’avait pas envie de se la jouer Cinq Plumes. Il y alla donc pour la carte d’Andrew tout court, charmant inconnu de la bibliothèque.

" Hey, tu joues dans un groupe ? Rock n’ roll, ce genre de trucs, ça te branche ? Tu sais jouer d’un instrument ? " Enchaîna Andrew en pointant le chandail au caractère musical que portait Aileine.

En réalité, son style vestimentaire au complet lui rappelait une rockeuse dans l’âme. Profitant de son incognito, Andrew s’adossa sur l’étagère derrière lui, et croisa les bras sur son torse avec nonchalance en jetant un coup d’œil sur le titre des livres qu’elle pouvait bien lire.

" Crimes atroces des siècles derniers ? T’es une fille hors du commun, toi. "

Au fond de lui, Andrew imaginait davantage Mélite d’Orcy emprunter de genre de trucs et les lires à minuit à la lueur d’une chandelle. Gamin, Andrew lisait des tonnes d’histoires d’horreur pour s’empresser de les raconter à sa petite sœur qui, depuis le récit d’épouvante sur le l’esprit frappeur dans le phare, n’osait plus mettre les pieds dans le vieux phare qui surplombait la pointe du domaine où ils vivaient, même en plein jour.

[navrée pour le retard ! shame on me! Toutes mes excuses ! mea très culpa!]

D’un coup d’œil rapide, Aileine détailla le physique d’Andrew. Mignon, très mignon même. Bref, il avait l’air sympathique et serait peut être la première personne de cette école dont elle connaitrait le nom.

-Pour le sauvetage, y a pas de quoi et tu peut m’appeler « mon héro » si ça te fait plaisir, dit elle en riant .Pour le fait qu’on ne se soit jamais croisé avant, je traine surtout ici et vers le terrain de quidditch. J’essaie d’éviter les endroits trop fréquenté, les groupies des 5 plumes me vrillent les tympans, c’est assez pénible.

Elle réajusta son chapeau sur son crâne, remerciant le seigneur que sa manucure, fruit de plusieurs heures de travail, n’ait pas bougé d’un poil.

*Il doit me prendre pour une idiote superficielle…pourquoi m’en soucier, il pense ce qu’il veut *

-Je joue de la guitare depuis pas mal de temps, et oui j’ai fait partie d’un groupe qui c’est séparé pour une histoire ridicule…enfin de mon point de vue. J’aimerais bien remonter un groupe un de ces jours, tu connais des musiciens ici ?

Arthur, sa guitare électrique, somnolait tranquillement sous son lit au dortoir, il était temps qu’elle se réveille ! Le premier groupe d’Aileine était composé uniquement de fille et s’appelait « la reine des glaces ». Un dom juan de seconde zone avait eu la brillante idée de séduire plusieurs membres du groupe et pour se venger, Aileine lui avait explosé 4 dents sur le devant de la mâchoire ce qui avait sonné la fin de « la reine ».

Depuis, elle attendait avec impatience le jour ou elle pourrait en remonter un, histoire de mettre un peu d’ambiance quoi. Pourtant elle n’avait pas envie de faire passer d’annonce, ou de punaiser un mot quelque part, partisane qu’elle était du bouche à oreille.

-Et pour répondre à ta dernière question, je suis plutôt bizarre comme fille. Par exemple, rien que d’entendre parler des 5 plumes, ça me donne la nausée. C’est bête, je n’en ai jamais croisé. Peut être qu’ils sont très sympathique, j’en sais rien.

Elle ponctua sa phrase d’un éclat de rire. Elle avait un rire doux, agréable, ni trop aigu ni trop rauque.

-Bref , ça t’arrive souvent de te faire sauver par une inconnue dans une bibliothèque ?

Andrew s’amusait de plus en plus de la tournure de la conversation. C’était inespéré. Il en remercia mentalement Antonia, où qu’elle soit, et se considéra plus que chanceux d’être tombé sur Aileine avant l’un de ses potes. Des filles comme Aileine, au style un peu punk, plus garçon que fille au niveau de l’attitude, ça ne courait pas les couloirs. Pas étonnant qu’elle méprise les Cinq Plumes avant même de les rencontrer. Elle devait avoir mieux à faire que de vérifier ce genre d’histoires. Andrew se surprit à noter les quelques points communs qu’il partageait déjà avec elle et ria à son tour.

" J’vois c’que tu veux dire, elles me vrillent les tympans aussi. "

Il était bien placé pour parler, c’était le cas de le dire. Certaines filles possédaient vraiment des cordes vocales à vous rendre sourd.

" Tu joues au Quidditch, ou tu vas t’asseoir dans les gradins pour avoir la paix ? "

Mieux valait vérifier s’il avait affaire à une joueuse avant de lui causer sport. Il misa sur la musique, qu’il savait déjà sûr comme terrain.

" Si j’connais des musiciens ? Tu veux dire à part moi ? "

Un sourire orgueilleux vint se dessiner sur son visage un court instant, puis il se mit à rire ouvertement de sa propre audace. Il n’avait pas souvent l’occasion d’évoquer ce passe-temps, et pourtant Andrew jouait régulièrement de la guitare. Alex et lui y consacraient toujours quelques heures par semaine pour ne pas perdre la main. Pour se détendre aussi, parce qu’on se le dise, draguer à temps plein n’était pas de tout repos.

" Comme toi, de la guitare. Une Jackson, depuis que j’ai treize ans. Elle est rouge, s’tu veux j’te la montrerai un de ces quatre. On essayera de jouer un morceau, voir ce que ça donne. "

Andrew n’avait jamais songé à créer un groupe. Sa guitare, c’était pour le plaisir. Ça le détendait, fallait pas chercher plus loin. Il récoltait suffisamment de popularité sans avoir à grimper sur scène par-dessus le marché. Sauf cette fois où il avait fait la fête au Corn Flex, accessoirement abusé sur le whisky et qu’il avait joué un solo de six minutes sur scène avec un groupe irlandais qui était de passage dans la région. Dans tous les cas, Andrew ne pensait pas réellement jouer de la guitare avec Aileine. Il ne pensait pas pouvoir garder si longtemps le mystère de son identité, et il croyait encore moins qu’elle accepterait de le côtoyer après ce mensonge sur son identité. Quoi que non, on ne pouvait pas vraiment parler de mensonge, il lui avait bien dit comment il s’appelait, et n’avait jamais nié être ou ne pas être l’un des Cinq Plumes. Peu de chances qu’elle en voit la nuance, se disait Andrew, alors aussi bien profiter de la situation avant que ça casse puisqu’elle ne semblait visiblement pas porter Andrew et ses potes dans son cœur. Encore et toujours ces histoires qui couraient sur eux. Certaines vraies, d’autres pas. Tout de même curieux, Andrew demanda :

" C’est pas un préjugé, ça, si tu les connais même pas ? Remarque, j'dis ça comme ça, tu peux bien en penser c'que tu veux, hein... "

Bon, terrain glissant. Ne pas s’y attarder. Prochaine question.

" Ça non, j’viens pas souvent à la bibliothèque. J’crois que la bibliothécaire m’aime pas depuis que j’lui ai rapporté un livre en lambeaux y’a trois ans, avec de la bave de chien en prime. Une longue histoire. Et puis t’es plus une inconnue, maintenant. D’ailleurs, tu veux pas qu’on aille s’asseoir un peu plus loin ? "

S’il ne se trompait pas, il y avait un divan, ou des fauteuils, quelques rangées plus au fond.

Ne connaissant pas les recoins de la bibliothèque, Andrew se laissa guider par Aileine jusqu’aux fauteuils, tout au bout de la rangée de livres. Il prit place dans le fauteuil adjacent et laissa son regard s’attarder sur l’immense vitrail qui faisait office de fenêtre. La grande classe, quand même, bien qu’Andrew ignorait le nom du type qu’il représentait, se doutant qu’il devait s’agir d’un sorcier renommé qui avait découvert un truc renommé qui lui donna le droit d’être gravé dans les anales de la magie, et sur le vitrail de l’université où il avait une drôle de tête en forme de triangle. Le tout rappelait à Andrew les puzzles qu’il faisait, tout gamin, à même le sol du salon. Ce fut le bruit d’un sac qui le tira de son inintéressante contemplation, et il adressa un large sourire à Aileine avant de plonger la main pour atteindre quelques friandises.

" Sympa, merci ! "

Andrew n’était pas fan de sucre, mais savait apprécier quelques bonbons et desserts à l’occasion. Il envoya une dragée dans les airs, ouvrit la bouche et la rattrapa en ricanant.

" Il y a une boutique de friandises au village. Tu vois où est la Pimentine ? C’est deux rues plus bas, sur la gauche. "

Pas qu’il y allait souvent, au contraire. Depuis le temps, Andrew connaissait Bourg-en-bière mieux que sa poche, et il passait forcément de temps en temps devant la boutique qui ressemblait à la maison de la sorcière dans le conte moldu d’Hansel et Gretel. Difficile d’emprunter la rue sans remarquer une boutique qui saute aux yeux comme ça ! Andrew mangea une autre dragée et écouta l’histoire d’Aileine, un sourire en coin sur les lèvres. Dragueur comme il était, il aurait très bien pu être le genre de type à briser un groupe de filles qui, avant sa venue, s’entendait à merveille. Même que c’est peut-être ce qui se produirait entre Alyrah et Samantha, deux cousines qui étudiaient à Swyn et qu’Andrew invita à sortir.

" C’était pas seulement la faute du gars, hein ! Les filles se sont laissées avoir aussi. Ce qui est con, c’est de briser un groupe pour une histoire de cœur. "

Et il le pensait. Entre les Cinq Plumes, il y avait une règle non dite. Une fille ne viendrait jamais se mettre entre eux, parce que ça n’en valait pas la peine, mais alors là pas du tout. Andrew pensait dur comme fer leur amitié plus solide que les beaux yeux d’une fille.

" Tu peux toujours aller squatter la salle de musique, c’est le meilleur endroit pour dénicher des musiciens. Tu jouais quoi dans ton ancien groupe ? Punk ? Rock ? Musique de chambre ? "

Andrew éclata de rire à sa dernière remarque, et avala la dernière dragée qu’il avait dans les mains quand Aileine vint à lui en demander davantage sur lui. Avec un peu de chance et quelques jeux de mots habiles, il parviendrait peut-être à ne pas révéler son identité, du moins son appartenance aux Cinq Plumes. L’idée de se prendre la couverture de « Crimes atroces des siècles dernier » en plein visage ne lui tentait guère ! Il réprima un sourire à cette pensée avant de se redresser sur son fauteuil.

" J’suis en Police magique, futur Auror, attraper les méchants et récolter les médailles, tout ça, tu vois un peu l’idée ? "

Il lui fit un clin d’œil avant de poursuivre.

" Je jouais aussi au Quidditch, à Salem. J’étais Poursuiveur et Capitaine, mais j’ai arrêté. C’est peut-être mieux comme ça, au printemps dernier j’me suis disloqué l’épaule en lançant le Souaffle à un entraînement. "

Depuis qu’il était à Swyn, il jouait au Quidditch pour le plaisir et pour garder la forme. Il remplaçait à l’occasion des joueurs malades ou blessés qui ne pouvaient participer à un match.

" Et j’viens à la biblio que pour me planquer, je lis pas de bouquins. Par contre, c’est la première fois que je ne tombe pas sur une fille binoclarde ou coincée. T’es drôle, tu joues de la musique, en plus d’être belle, où est l’os ? "

Aileine se mit à rire. Pour elle l’os était si évident qu’elle n’avait même pas besoin d’en parler. Elle s’enfonça un peu plus dans son fauteuil, secoua la tête pour cesser de rire et inspira un grand coup.

-Je vous qui tu maitrise la technique de l’interrogatoire, tu as de l’avenir chez les aurors, c’est sûr. Je vais répondre à tes questions dans l’ordre pour éviter de m’embrouiller. Premièrement, Pimentine, je ne vois pas du tout ou c’est.

Aileine n’avait aucun sens de l’orientation et se serait perdue même avec un gps puissant .D’ailleurs, elle l’avait déjà fait. Ses parents avaient mit toute une après midi à la retrouver, perdue dans Moscou. Ils l’avaient retrouvée en train de grelotter accrochée à une bouteille de vodka frelatée qu’elle s’apprêtait à entamer. Elle s’était prit une claque de la part de sa mère qui lui avait rendu des couleurs aux joues.

-Ensuite, oui, les filles sont également responsable, j n’ai jamais dit le contraire. Franchement, tout fiche en l’air pour une histoire d’amour, c’est idiot. L’amour pour toujours avec les petits oiseaux, ce ‘est que dans les romans. Ici, quand tu es amoureuse de quelqu’un, surtout à notre âge, tu dois savoir que ça ne va pas durer. Profite du temps que ça dure et quand c’est fini, eh bah remet toi et avance. Pour moi, c’est comme ça que ça marche.

Aileine avait eu un petit ami en Russie. Ils s’étaient séparés quand elle était partie en Irlande. Ca ne lui avait pas fait grand-chose. Peut être que ce qui lui avait un peu manqué, c’était leurs soirées devant la télé à regarder des films d’horreur et essayer de deviner la fin.

-Niveau musique, j’aime le rock et le visual , j’essaie de faire un peu des deux , j’ai deux trois compos qui trainent mais tu as raison, j’irais trainer en salle de musique un de ces 4.En tout cas, si tu cherche un poste de guitariste lead, préviens moi.

Non, ce n’était pas une manière de le draguer, juste l’opportunité de recruter un musicien. Elle n’avait pas l’intention de le draguer, même si elle le trouvait à son gout.

-Moi aussi, j’ai fait du quidditch, mais en temps que batteuse. Avec l’équipe, on a gagné la coupe inter maison de mon école, la dernière année. J’étais à Bolgarski.

Enfin on en venait à l’os.

-L’os, enfin les os, c’est que je ne suis pas jolie et que j’ai horreur de me laisser marcher sur les pieds je suis un peu suceptible résultat avant de me retrouver à Bolgarski j’ai été renvoyée de Poudlard en troisième année.

Andrew trouvait surprenant qu’elle ne sache pas où se trouvait la Pimentine. Aileine avait pourtant l’air du genre de fille à sortir s’amuser le vendredi soir, ne serait-ce que pour jouer un peu de musique dans le bar du coin. D’un certain point de vue, c’était pas plus mal. Même que réflexion faite, l’idée ne lui déplaisait pas.

" J’te montrerai où c’est, et on en profitera pour aller boire un verre à la Pimentine ! J’connais bien le gérant, si ça se trouve, il sera d’accord pour ranger son jukebox un soir pour des vrais musiciens, qu’est-ce que t’en penses ? "

Quelque part au fond de lui, Andrew était persuadé que la chimie passerait bien entre Aileine et lui. Si l’occasion venait pour eux de jouer ensemble, qui sait ce que ça donnerait… Elle avait une tête sur les épaules, mais surtout, elle vivait un jour à la fois. C’était con, mais à part Mani et Lauréline, Andrew ne connaissait aucune autre fille capable de penser comme ça. Et puis comme le disait Aileine, suffisait de profiter du temps qui passe, et quand c’est fini, c’est fini. Croire que l’amour ne durait pas, ça, elle devait bien être la seule à le penser dans toute l’université. Tant mieux si elle pensait comme ça. À entretenir une mentalité pareille, elle ne devait pas savoir ce que c’était qu’un cœur brisé puisqu’elle ne considérait aucune relation amoureuse comme sérieuse.

" Guitariste lead, ça pourrait être sympa ! Faudrait déjà essayer de jouer quelques morceaux pour voir. Par curiosité, tu voudrais un groupe de combien de musiciens ? "

Il n’avait jamais songé à monter un groupe. L’idée lui plaisait bien, quoi qu’il n’était pas habitué d’accorder sa guitare avec le rythme d’autres instruments. Il fredonnait des airs à l’occasion en jouant, sans plus. Considérant l’offre, il se cala un peu plus dans le fauteuil, attentif aux paroles d’Aileine.

" Quidditch en plein blizzard, ça doit être du sport ! "

Russie ne voulait pas forcément dire neige éternelle, mais Andrew aimait l’idée de jouer des parties de Quidditch en plein hiver dans la tempête. Niveau challenge, ça devait être plutôt cool, contre le vent, les flocons et tout ça. Il esquissa un sourire. Batteuse au Quidditch, un autre point commun. Alors que cette pensée frôlait son esprit, Aileine aborda enfin la question de l’os. À sa réponse, Andrew éclata littéralement de rire en tapant sur sa jambe.

" Me dis pas que t’as été renvoyé de Poudlard pour mauvais caractère ? "

* C’pas sérieux *

On ne se faisait pas expulser d’une école pour ne pas s’être laissé marcher sur les pieds. Andrew se pencha au-dessus de l’accoudoir du fauteuil pour se rapprocher d’Aileine, tout sourire.

" Allez, raconte ! T’as fait quoi pour qu’on te vire ? "

Peut-être qu’elle s’était battue, ou alors elle avait fait exploser le local de potions ? Andrew n’avait pas la réputation d’être un élève sage, et pourtant on ne songea jamais à le menacer d’expulsion. Fallait aussi dire qu’il était moins turbulent à Salem, et qu’en cinq années passées en Irlande, il se battait surtout dans les bars. On l’avait déjà foutu dehors du Corn Flex à quelques reprises, mais il pouvait y remettre les pieds dès le lendemain.

" J’tiens quand même à te contredire sur un point, dans ton histoire d’os…"

Andrew planta son regard dans celui d’Aileine, et après quelques secondes de silence, il termina sa phrase.

" T’es très jolie. Vraiment, j’le pense. "

Le truc avec Aileine, c’est qu’elle avait du style. Ses vêtements dégageaient sa personnalité. Qui plus est, pour Andrew, une belle fille ne se résumait pas à une robe délicate et une fleur dans les cheveux. Il n’était pas si fermé d’esprit.

C’est qu’il pouvait s’en passer des choses, pendant un match de Quidditch. Andrew ne pouvait pas jurer n’avoir jamais fait de coups tordus non plus. Il jouait beaucoup sur les feintes, préférait tromper l’équipe adverse en leur faisant croire qu’il tirerait le Souafle au joueur sur sa gauche alors qu’en fait il tentait directement un tir dans les buts. Ça fonctionnait surtout lorsqu’il jouait pour la première fois contre une nouvelle recrue, parce qu’à force de jouer entre les maisons de la même école, il fallait se montrer inventif en renouvelant sans cesse les stratégies. Mais ça aussi, c’était stimulant, de mettre en place de nouveaux plans, surtout lorsqu’on prenait en compte l’environnement parce qu’on ne joue pas une partie de Quidditch de la même manière au plein soleil qu’au beau milieu d’un blizzard, et ça, Aileine le comprenait aussi très bien. Ceci étant dit, elle passa à un autre sujet et lui raconta son renvoi de l’école de magie de Poudlard.

" C’est con, les filles de Gryffondor faisaient ça sans raison, que pour faire chier ? "

Saboter un balai, c’est un coup dur, Andrew tenait quand même pas mal au sien, mais si quelqu’un cramait ses cadeaux le matin de Noël, alors là, ouais, ça méritait bien de casser un balai en deux, même si c’était le dernier modèle de l’année ! Il n’était pas spécialement rancunier, pas du tout même, mais si quelqu’un dépassait les limites, qui sait ? La colère, c’était pas toujours un truc facile à contrôler.

" Connais pas, non, mais mon arrière grand-père a fait ses études à Poudlard. Paraît que c’est vachement reconnu, comme école, j’en sais rien. Bolgarski, c’était comment ? "

Il avait noté qu’elle parlait de ses grands-parents, et non de ses parents, mais ne chercha pas à soulever la chose. La famille, peu importe l’interlocuteur, ça semblait toujours un sujet pas très agréable à discuter. À croire que les familles heureuses, ben ça n’existait plus, et que de nos jours, les parents n’étaient qu’une source de problèmes. Peut-être pas pour Aileine, en fait il n’en avait pas la moindre idée, puisqu’il n’avait pas demandé pourquoi ses grands-parents… Mais une minute ! Antonovitch ? Comme dans « La baguette possédée » et « L’affreuse mort de Gwen la rouge et sa plus affreuse encore résurrection » ?! Andrew reconsidéra Aileine un bref instant.

" Dis, Boris Antonovitch, tu connais ? "

Mais il n’avait pas répondu à ses autres questions. Andrew se demandait même ce qu’il pourrait lui dire sur lui sans éveiller un soupçon sur son identité de membre des Cinq Plumes.

" Je suis d’Amérique, du Maine, c’est un peu paumé, comme endroit. J’ai étudié à Salem. "

Bon, ça, c’était dit, mais pour les amis proches ? Répondre « Oui » serait trop facile, d’autant plus qu’elle demanderait qui par la suite. Il pouvait toujours citer Mani et Lauréline pour sauver la mise, mais en même temps, plus longtemps il ne lui dirait rien, plus grande serait sa colère lorsqu’elle l’apprendrait, surtout si elle finissait par l’apprendre de quelqu’un d’autre. Franchise, pas franchise ? Aileine semblait avoir une tête sur les épaules, elle ne lui jetterait pas forcément le reste de ses bonbons à la figure avant de se fâcher et de quitter la bibliothèque sans un regard en arrière. Le truc, c’était que les filles intelligentes fronçaient des sourcils de méfiance, quand elles savaient qu’un Plume se trouvait devant elles.

" Alex, Elias, Ted et Malloy, ça te dit quelque chose ? "

Un sourire en coin au visage, Andrew guettait la réaction d’Aileine. Advienne que pourra, le sort en était jeté, et la balle était dans son camp, à présent, admettant bien sûr qu'elle connaisse le prénom des quatre autres Plumes.