S.W.Y.N ¤ Someone Wants You Nuts ¤
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 Une lettre, des lunettes bleues et trois petits points.

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Gabrielle E. Dimitrov
A.C.A.I.I
A.C.A.I.I
Gabrielle E. Dimitrov



 
▌Né(e) le: 13 Novembre.
▌Pays d'origine: Corée.
▌Statut: 3ème année

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MessageSujet: Une lettre, des lunettes bleues et trois petits points.   Une lettre, des lunettes bleues et trois petits points. EmptyDim 22 Nov - 18:01

- Fiente !
Le mot était vilain. Pourtant, il paraissait comme une caresse, dans la bouche de cette frêle et jeune fille en fleur ... Jeune fille qui venait par mégarde d'égarer une feuille de partitions malicieuse dans la brise fraîche de ce matin d'automne, et courait à présent à sa suite sans faire attention aux éventuels passants qui auraient pu se trouver sur son chemin. Charmant tableau, n'est-ce pas ? Et elle courait, courait, tendait les bras en avant pour tenter de saisir cette feuille, qui par mille et unes astuces réussissait à échapper aux mains doucettes de la mignonne ; elle courrait, courrait, jusqu'à ce que boum patatra.
- Putain, tu peux pas regarder où tu vas ?
Miséricorde ! Elle venait d'entrer en collision avec un individu dont le visage exprimait tout sauf de la sympathie. Un visage aux traits légèrement asiatiques, finement ciselé, et pourtant dur. Un visage illuminé par ...
- Hic !
La gamine en oublia de se confondre en excuses. Ces yeux ! Cernés, oui, mais bleus ! D'un bleu ! Si bleu !
- Si tu continues à me regarder comme ça, t'es bonne pour courser ta feuille une nouvelle fois, et je te garantis que ces merdes-là ne s'attrapent pas facilement ...
Oh, la partition ... Elle cligna une fois des yeux, deux fois, se saisit de la feuille et partit en courant.
Dans la rue, Gabrielle se remit à marcher.


_____________________________

>> La chance, c'est la faculté de s'adapter instantanément à l'imprévu.
[Alfred Capus]



¤


Le billet lui était parvenu il y avait déjà deux heures ; mais arrivé entre les mains d'une Gabrielle qui venait de se lever, il s'était retrouvé très rapidement sur la table de chevet, entre une lampe sans ampoule et un vieux livre à la couverture à moitié décollée. Il avait patienté, sagement, comme une lettre polie se devait de le faire, sans plainte et sans soupir. Il avait attendu, deux heures durant, que sa destinataire daigne lui accorder une seconde d'attention. Et pour son plus grand bonheur, celle-ci l'avait pris dans ses mains fines, déplié, et lu, enfin.
Ce billet, dont nous suivons le périple depuis maintenant quelques lignes, tenait à peu près ces mots :


    Je serai à la Pimentine vers 21H.
    Si ça te dit, tu peux m'y rejoindre ; on pourra parler de tout et de rien, d'art moldu ou de n'importe quoi d'autre.
    De toute façon, tu sais bien que si tu ne viens pas, tu le regretteras.
    Signé : Matisse.


L'écriture, peu soignée, appartenait selon des codes vieux du temps des dinosaures à un individu de sexe masculin, ou en tous cas s'en approchant. L'hypothèse d'un monstre humanoïde asexué n'était pas à ignorer ... La signature, quant à elle, pouvait susciter quelques questions. Matisse ... n'était-il pas mort ? Mystère.
Devant un contenu aussi énigmatique, n'importe qui se serait interrogé, aurait relu ... Aussi le billet attendait-il une réaction intéressante de la part de son lecteur ; réaction qui ne vint pas. Il eut beau attendre, elle ne réagissait pas. Quelle déception aurait-il ressenti s'il avait su que le regard si bleu de cette jeune fille ne parcourait pas ses lignes d'encre, mais les bords du papier ... Et enfin, quand elle se mit à s'intéresser aux mots en eux-même, il n'eut pas le temps de comprendre ce qu'il lui arrivait. Le billet prit feu et mourut de façon prématurée, devant ces yeux qui semblaient océan déchaînés, sous le feu de la colère.

Gabrielle n'aimait pas les lettres ; surtout quand elles étaient mal écrites. Oui, c'était une sauvageonne sans éducation, malpolie et vulgaire, mais cela n'empêchait pas qu'elle appréciait la bonne lecture et savait la reconnaître. D'autre part, si les lettres l'insupportaient autant, c'était à cause de leur contenu bien souvent inintéressant, et du fait que ces mêmes mots, si ennuyants fusse-t-il, pouvaient lui parvenir de vive voix, et ce sans aucun problème de transport. On n'apprenait pas à transplaner pour rien ... C'était aux moldus, d'écrire des lettres, pas aux sorciers. D'ailleurs, eux-même avaient des systèmes plus élaborés ... Ainsi Gabrielle avait-elle supprimé ce piètre billet immédiatement après sa lecture, sans aucun état d'âme.
Enfin, ce n'était pas tout ... Restait à comprendre dans quel but on l'avait invitée à 'discuter de tout et de rien', dans un endroit qu'elle ne fréquentait jamais, un jour de pluie de surcoît, elle dont la réputation se situait en dessous du zéro et stipulait que s'approcher de trop prêt d'une Dimitrov était douloureux. Ah, et puis il fallait encore trouver qui était l'imbécile qui avait signé Matisse.
Seulement, Gabrielle n'avait pas le temps de s'amuser à décoder ces stupidités. C'est qu'elle avait foule de choses à faire, la demoiselle ... Genre ranger son coin de chambre, rendre visite aux hiboux, écrire à son frère - no comment, 'faut surtout pas chercher à comprendre cette fille -, flâner ... Foule de choses, vous dis-je. Et retrouver les fanatiques de Matisse n'était pas vraiment sa tasse de thé. C'est dans cet état d'esprit que notre Cinnacrow asociale - pléonasme ? - rangea la lettre dans un coin de sa tête et se dirigea résolument vers la porte du dortoir, dans l'idée de sortir s'aérer.

¤



>> L'indécision en effet est une solitude. Vous n'avez même pas votre volonté avec vous.
[Victor Hugo]


Nous retrouvons donc notre phénomène errant dans les rues, désœuvrée, les mains dans les poches et l'air blasée. Cette journée qui devait être si remplie était finalement aussi vide que les autres, et ce malgré la bonne volonté de Gabrielle ... Le soleil disparaissait déjà derrière les nuages alors qu'elle s'installait sur un banc en remontant le col de sa veste.
Il faisait gris et froid, un soir d'automne. Les passants se faisaient rares, et l'on voyait les boutiques se vider peu à peu, et se fermer. Une à une. Gabrielle ne bougeait pas. Elle ne bougea pas lorsque un vieil homme s'installa à côté d'elle, ne bougea pas non plus lorsqu'il repartit. Elle ne bougea pas quand on sonna les vingt et une heures. Et puis sa main se leva, lentement, à hauteur de son visage. Sa montre indiquait deux heure, cassée depuis des semaines peut-être. Elle cligna des yeux. Frissonna.
Qu'avait-elle à perdre, après tout, à aller à ce rendez-vous ? Elle n'avait plus une mornille en poche, et se faire inviter ne serait pas du luxe, avec sa situation financière actuelle ... Seulement, ce Matisse ne lui disait rien qui vaille. Qui était-ce ? A bien y réfléchir, même après son passage en deuxième année, Gabrielle ne connaissait pas grand-monde, si ce n'étaient les quelques clampins qu'elle retrouvait pour les cours en amphithéâtre. Et dans cette masse d'imbéciles heureux, elle ne voyait vraiment pas qui pourrait ... A moins que. Il y avait bien une fille qui lui avait fait de l'œil, en cours d'étude des objets magiques. Ou plutôt, lui avait demandé son nom en la regardant bizarrement, ce qui était à peu près pareil. On ne demandait pas son nom à une Dimitrov sans avoir une idée derrière la tête. Mais là, ça posait problème ... Soit ladite fille prenait Gabrielle pour un homme, auquel cas elle allait être déçue, soit elle était lesbienne. Ce qui ne gênait pas l'intéressée, mais ne l'arrangeait pas non plus. Seulement ... Pourquoi aurait-elle signé Matisse ? Gabrielle eut beau chercher, elle ne trouva aucune hypothèse un tant soit peu cohérente. Zut, c'était pénible, à la fin ! Inviter quelqu'un sans se faire connaître avait vraiment quelque chose de pervers, quand on y pensait. L'un savait et l'autre pas ; l'un avait toutes les cartes en main et l'autre tentait vainement de deviner les intentions de son adversaire masqué ... Gabrielle lâcha un juron et se leva brusquement, sans faire attention à l'engourdissement qui avait pris possession de ses jambes. Un peu trop brusquement d'ailleurs ; elle dut s'accrocher maladroitement au dossier du banc pour ne pas tomber.
- Bordel.
C'en devenait ridicule. Un simple billet réduit en cendres depuis longtemps pouvait-il être la cause de tant de questions ? Elle en était presque mal à l'aise. Les nouveaux prémices de la paranoïa qu'elle avait manifesté dans ses années d'école, peut-être ; la sensation d'être espionnée, suivie. Elle l'avait déjà vécu, et elle ne voulait plus le vivre. Matisse ou pas, il était hors de question de repasser par là ... La solution la plus efficace était sans doute d'aller à ce rendez-vous ... et d'aviser après. En fait, ledit Matisse allait très certainement se prendre quelques insultes et un poing dans la gueule, sans aucune transition. Gabrielle se mordit le pouce avec toute la force qu'il fallait pour se calmer, et sans faire attention à la goutte de sang qui en perlait, se mit en route en réajustant le col de sa veste une dernière fois.

¤


>> La perte d'une certaine pudeur comme la perte de la pureté sont les causes profondes de la décadence du monde.
[Mère Teresa]
« Ahah, la Teresa aurait sûrement plu à Mélite ... »


Bon. Surtout, ne pas s'énerver tout de suite, ça pourrait mal finir. De toute façon, ça va mal finir. Inspire, expire. Mais non, ça va passer. Respire par la bouche, alors ... Tu vas y arriver. Ouiii, c'est bieeen ... Pfiouh. Let's go.
- J'vais massacrer quelqu'un.
Gabrielle passa le pas de la porte avec l'expression de celui qui compte le nombre de morts dans un champs de bataille vieux de quelques semaines déjà. Autrement dit, avec une moue plus ou moins dégoûtée. Le nez froncé et les cheveux dans les yeux, la garçonne se sépara de sa veste et se retint de frapper immédiatement l'imbécile qui la regardait avec des yeux vitreux, prise soudain d'une envie de meurtre. Pourquoi était-elle venue, déjà ? Ah oui, pour rencontrer Matisse et lui parler de tout et de rien. Génial. Autant se tirer une balle tout de suite ...
La Pimentine était considérée comme un endroit convivial et sympathique par la majorité des habitants de Bourg-en-Bière, et surtout par les étudiants de Swyn. A cet instant, Gabrielle se demanda si elle ne s'était pas trompée d'endroit ... Qu'y avait-il de sympathique à cet amas d'humains riant trop bruyamment et noyant leur médiocrité dans trop d'alcool ? C'était puant, nauséabond, de mauvais goût, ignoble, mais sympathique, ça non. C'était tout sauf sympathique. Affrontant courageusement son dégoût, elle se concentra du mieux qu'elle put pour ignorer l'odeur et retrouver un visage un peu moins expressif, persuadée d'être tombée dans un carnaval de monstres.
Elle s'apprêtait à rejoindre une table miraculeusement libre lorsqu'un serveur un peu trop zélé la percuta de plein fouet, faisant tomber verres et assiettes dans un grand bruit de casseroles et éclaboussant par la même occasion les personnes alentours. Gabrielle chancela un instant, se sentit tomber à son tour, et lâcha un hoquet de surprise en sentant des bras se refermer sur elle sans prévenir.
- Rien de cassé ?
Son cœur rata un battement. Cette voix ...
- Lâche-moi !
Prise de panique, elle se dégagea violemment de l'étreinte indésirable et recula de quelques pas pour s'en éloigner. Une masse de souvenir la prit au dépourvu, assaillant de toute part son esprit déjà embrumé ; ses mains, fébriles, cherchèrent quelque chose sur quoi s'appuyer, sans trouver.
Matisse ... C'était lui, elle aurait dû le deviner tout de suite. La fête de l'été, les rires, l'alcool, les cigarettes, ... tout lui revint en mémoire. Tout ce qu'elle avait tenté d'oublier rapidement après l'énorme mal de tête qui avait suivi. Puisant dans ses dernières ressources pour ne pas perdre son calme, elle lança d'une voix froide :
- Matisse est mort le 3 novembre 1954.

    [Reservé]


Dernière édition par Gabrielle E. Dimitrov le Mer 7 Avr - 19:38, édité 3 fois
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Elias Jensen
M.U.M
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Elias Jensen



 
▌Né(e) le: 5 Octobre
▌Pays d'origine: Danemark
▌Statut: 5ème année

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MessageSujet: Re: Une lettre, des lunettes bleues et trois petits points.   Une lettre, des lunettes bleues et trois petits points. EmptyMer 16 Déc - 21:51

C’était parti d’un rien. Une connerie lancée comme ça. Un pari entre eux cinq. Relever des challenges de drague et séduire suffisamment leur proie pour qu’elle accepte de devenir leur cavalière pour le bal de Noël. Formulé comme cela, ça semblait simple. Et c’est bien connu, Elias n’aime pas la simplicité. Pour lui, il faut toujours des défis, des vrais. Et même quand ce n’est pas lui qui en demande, le hasard lui en met sur son chemin. Alors il les relève, avec plus ou moins de brio. Ted avait cité Louise Léocadie, comme ça, pour rire. Grand mal lui en prit, car elle lui fut désignée ! Avec des sourires sournois, chacun avait alors réfléchi à une proie. Sa proie, ou celle d’un autre. Des noms furent cités, Mélite d’Orcy entre autre. Là, Elias avait tiqué. Il n’avait pas pu s’en empêcher. Les autres avaient fait des blagues de mauvais goût à son sujet et notre danois avait fait remarquer d’une voix un peu sèche que ce n’était pas la peine de viser aussi haut car jamais Mélite d’Orcy n’avait participé à la moindre festivité dans l’université, et que dans tous les cas celui qui devrait se la coltiner n’arriverait à rien. On l’avait approuvé, non sans un regard sceptique à son égard. Son arrivée en fanfare, la Cinnacrow dans les bras le soir d’Halloween, avait marqué les esprits, sans que personne ne parvienne à comprendre comme sa route avait pu croiser celle de l’étudiante la plus coincée de S.W.Y.N. Lui-même s’était abstenu de tout commentaire à ce sujet.

Alors, il avait fallu qu’il trouve quelqu’un… une proie, mais pas n’importe quel genre de proie. Un challenge vous disais-je, et cela rimait très fortement avec Cinnacrow. Oui, mais qui ? Un souvenir lui traversa alors l’esprit : de taille correcte, pas bien grosse, des cheveux corbeau, des yeux tout aussi sombres… ce bleu foncé, intense, déroutant et cette lèvre en sang. La Cinnacrow de la Fête d’Eté. La forte tête avec qui il avait rapidement discuté, au comptoir. Il aurait bien aimé lui parler plus longtemps, d’ailleurs. Elle semblait avoir un tempérament comme il les aime : un caractère bien trempé, une conversation étonnante. Elle ne mâchait pas ses mots et Elias avait apprécié. Alors, ce fut son simple prénom qu’il prononça.


- Gabrielle…
il avait pensé à voix basse mais Andrew l’intercepta dans la seconde.
- Gabrielle Dimitrov ? T’aimes vraiment te faire du mal Elias ! Mais si tu veux la choisir, fonce, j’crois pas qu’on va te la prendre.

Et ils partirent dans un éclat de rire. Elias haussa les épaules. Elle ne lui avait pas paru si farouche, de prime abord. Il pensait même qu’ils pourraient parvenir à s’entendre, alors, l’inviter au bal… une simple formalité, non ? Après cette entrevue, les Cinq Plumes s’étaient tous trouvé une cible pour le bal de Noël. Ce n’était pas une entreprise des plus subtiles, mais chacun s’y tenait attentivement. Ils n’en parlaient qu’entre eux, afin de ne pas faire échouer leurs chances, et chacun faisait le topo de leurs avancées. Ted avait été le plus rapide à inviter Louise. Cette dernière était du genre accessible, il n’avait pas eu à trop se prendre la tête. A l’inverse, le cas Dimitrov était tout autre. Jusqu’à la Fête d’Eté, Elias ne lui avait jamais parlé. Il n’avait que difficilement réussi à obtenir son prénom, c’est pour dire… Il avait appris par la suite qu’elle était en deuxième année à Cinnacrow et, pour faire dans l’original, suivait des cours de Défense Contre les forces du Mal. Il n’en savait pas plus. Etait-elle elle aussi du genre sang pur frigide ou se lâchait-elle un peu plus ? Il ne pouvait que l’espérer, sinon il était mal parti pour remporter le pari… Il avait tout de même tenté sa chance dans un petit billet, court, mais efficace, pensait-il. Il ne savait absolument pas si elle l’avait lu. Il avait opté pour un moyen de distribution discret, les elfes de maison. Tauzia, plus particulièrement. Cette elfe de maison est tout ce qu’il y a de plus sympathique et Elias s’était toujours bien entendu avec elle. Il faut dire que dans le genre tolérant envers toutes les créatures que cette Terre peut porter, il n’y a pas mieux. Il l’avait trouvé sans mal au niveau des cuisines et lui avait confié le billet, plié avec attention, en lui demandant de le poser sur la table de nuit de Gabrielle Dimitrov de façon à ce qu’elle seule puisse le voir et le lire. L’elfe de maison s’était exécutée dans un sourire et désormais, notre danois ne pouvait qu’attendre.

Et il était plutôt confiant. Comme c’était souvent le cas dans ce genre de situation. De l’insolence et de la prétention, sans doute, mais il se disait que si ce n’était pas le souvenir de leur conversation qui pousserait la Cinnacrow à faire le déplacement, ce serait la curiosité. Entre temps, la journée s’était déroulée comme à son habitude. Le soir, aux alentours de 20h, il s’était changé en vitesse, optant pour une tenue simple et décontracté, comme il les aime. Une veste bleue foncée sur une chemise blanche débraillée et un pantalon en toile noire un peu ample. Comme toujours, ses grosses lunettes de Quidditch sur la tête et sa multitude de colliers au cou. Elias Jensen au naturel, donc. C’était toujours sur son charme inné qu’il comptait pour faire tourner la tête des jeunes filles qu’il invitait, même si c’était grâce à son intelligence et la justesse de ses propos qu’il parvenait concrètement à ses fins… Avec la jeune Cinnacrow, il n’avait dans l’immédiat aucune idée précise en tête. Il voulait juste discuter. Elle l’avait amusé, à la Fête d’Eté, et il se souvenait très bien du paquet de cigarettes qu’il lui avait tendu et des verres qu’il lui avait servis. Elle ne tenait pas du tout l’alcool d’ailleurs, et la conversation en avait été d’autant plus étrange. Alors il y allait tout simplement, les mains dans les poches. S’il devait parvenir à l’inviter au bal, il devrait surement prendre son temps. Cela ne lui semblait pas être une épreuve insurmontable, il devrait s’adapter au caractère de l’étudiante qu’il n’avait pas encore pleinement cerné.

Sans savoir si elle allait venir, il se rendit à Bourg-en-Bière, pile dans les temps. Il avait cru bon de jouer la carte du mystérieux inconnu en signant Matisse. Cela était risqué mais peut-être que ça porterait ses fruits… lui se souvenait bien du monologue de Gabrielle à propos du peintre moldu, il restait à savoir si elle n’avait pas oublié leur petite conversation. Lorsqu’il arriva en vue de la Pimentine, il crut la reconnaitre, de dos. Ses longs cheveux sombre et sa taille fine ne laissaient planer aucun doute, quant à son style vestimentaire à la garçonne, il était facilement reconnaissable. Un jean troué, une chemise froissée, c’était un style particulier mais qui ne lui allait pas trop mal, songea-t-il, grâce à la vue qu’il en avait. Il la suivit discrètement, de loin, et entra un peu après elle dans la Pimentine. Amusé par cette situation, il prit le même chemin qu’elle au travers des tables du bar, ce qui lui permit, coup de chance, de réagir très rapidement lorsqu’il la vit percuter un serveur. D’un bond en avant, il la saisit dans ses bras.


- Rien de cassé ?

Seulement, la jeune fille était loin de vouloir le remercier. Réalisant visiblement qui il était et comprenant soudainement pourquoi Matisse, elle lui demanda de la lâcher, ce qu’il fit, en prenant un air un peu désemparé. Après tout, ne l’avait-il pas aidé ? Il indiqua d’un geste de la main au serveur qui s’excusait que tout allait bien et fit disparaitre d’un rapide coup de baguette des restes de nourriture éparpillés à leurs pieds. C’était rare qu’il ait le réflexe d’utiliser un sort, mais un coup de Récurvite, c’était basique… La Cinnacrow prononça alors une phrase totalement hors de propos, pendant qu’il rangeait sa baguette dans la poche arrière de son pantalon. Il ne put s’empêcher de rire.

- Et ben, une vraie encyclopédie. Si tu me le permets, je me propose d’être la réincarnation de ce Matisse, le temps de cette soirée.

Sa voix enjouée contrastait fortement avec le ton glacial que Gabrielle avait utilisé pour lui parler. Il fallait qu’il y aille avec des pincettes. Elle ne semblait pas forcément très coopérative.

- Acceptes-tu de prendre un verre avec moi et de manger un bout ou même malgré mon sauvetage inopiné mon identité te pose problème ? Pourtant, c’était sympa de discuter à la Fête d’Eté non ? Je vois que ça va mieux ton visage, d'ailleurs...

Il fit une légère pause, se décala en direction de la table libre et l’invita d’un geste galant à s’y asseoir.


- J’invite et j’ai des cigarettes avec moi si tu veux…

Qui sait… Des fois, ça marche. Et si ce n’était pas le cas, il avait encore bien d’autres tactiques.
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Gabrielle E. Dimitrov
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MessageSujet: Re: Une lettre, des lunettes bleues et trois petits points.   Une lettre, des lunettes bleues et trois petits points. EmptyJeu 24 Déc - 14:24

Elias Jensen. Matisse pour les intimes. Membre des cinq plumes et chevalier de ces dames. J'ai pas vraiment envie de te voir. Pas vraiment envie de t'entendre. Pas vraiment envie de te savoir à côté de moi. Pas du tout envie, en fait. Je ne sais même pas pourquoi je suis encore ici, pourquoi je t'écoute. Pourquoi je suis assise sur cette chaise à attendre le serveur qui m'a poussée dans tes bras.
Ca faisait longtemps que l'on ne s'était pas vus, Elias Jensen ; pas assez à mon goût. Je pense que j'aurais préféré que tu disparaisses tout simplement. Que j'aurais préféré ne plus jamais te revoir. Oh, non, ce n'est pas de ta faute ... A bien y réfléchir, tu a seulement joué ton rôle. Mais Elias, putain, ce soir là, t'aurais pas pu me dire de fermer ma gueule ? Tu aurais dû m'ignorer, m'oublier comme les autres. Je t'en veux, oui, je t'en veux de m'avoir écoutée. Je ne veux pas que tu te souviennes de moi, je ne veux pas de toi. Je ne veux pas de vous. Je ne veux de personne. Peut-être toi en particulier. Peut-être à cause de ton attitude. Peut-être à cause de tes yeux. J'en sais rien, j'veux pas savoir.
J'veux juste fondre, là, maintenant, comme un sucre dans une tasse de café. Me dissoudre un peu plus.

Elle avait suivi, docile, son bourreau jusqu'à la potence. Presque calme. Presque sereine. Presque.
Elle savait qu'au fond de ses poches trouées, les jointures de ses doigts n'avaient pas perdu leur blancheur, et que tôt ou tard, elle exploserait. Elle savait que le barrage de sa volonté ne résisterait pas bien longtemps au flux de frustration et de colère qui la titillait depuis trop longtemps déjà. Elle savait qu'à moins d'un miracle, quelqu'un allait avoir mal. Alors oui, elle était tendue. Merde. Dix-neuf ans bientôt qu'elle était tendue. Dix-neuf ans bientôt qu'elle se retenait de balancer ses poings dans la gueule de n'importe qui pour n'importe quoi. L'un de ses anciens potes lui avait bien dit un jour qu'il ne fallait pas se retenir, que c'était dangereux de ressasser sa colère ... Quelques heures plus tard, on le transportait d'urgence à l'hôpital. Gabrielle n'avait plus jamais écouté ses conseils.
Voilà ce à quoi s'exposait Elias Jensen, en invitant Gabrielle Elisabeth Dimitrov à la Pimentine. Sans doute connaissait-il les risques ... Sans doute n'avait-il pas bien pris au sérieux les rumeurs qui circulaient à propos de cette machine à frapper. Sans doute se croyait-il assez fort pour résister à une gamine de deuxième année, aussi. Ce qui n'était pas faux, en soi ... Et puis Gabrielle était agressive, pas vicieuse. Il risquait juste de se prendre des coups, pas de se faire pourrir la vie jusqu'à la fin de son cycle universitaire. Alors pourquoi hésiter ? Oui, pourquoi.

J'aimerais bien avoir une vie un peu plus normale, des fois. Être une de ces dindes qui pleurent parce qu'elles viennent de se prendre un râteau et se soucient plus de leur ligne que de leur avenir. Ou un de ces mecs qui sautent les filles à la chaîne et se bourrent la gueule jusqu'à vomir leurs entrailles ... Mais non. J'étais déjà dérangée et on m'a encore un peu plus détraquée. J'pense que j'vais aller vivre toute seule dans la montagne, en ermite. Swyn, ma mère, tous ces cons, je les emmerde, vous me faites tous chier. Non Maman, je ne serai pas chercheuse. Non Professeur, je n'aurai pas mes exams, et j'en ai rien à foutre. Et toi, Jensen. Toi. Tu ...


« J'ai pas faim. »

Non seulement elle n'avait pas faim, mais aurait-elle tenté d'avaler quelque chose qu'elle serait allée se vider les intestins quelques minutes après. Tout ici la révulsait. Et lui criait de partir. L'idée de se lever et de quitter les lieux sans prévenir l'effleura un instant, séduisante ... un peu trop. La porte était pourtant là, à quelques mètres, entrouverte. Derrière il y avait l'extérieur, le gris du ciel, les lampadaires et les pas des funambules nocturnes, les lumières des magasins, le bruit de fond des restaurants, l'espace, la liberté. La liberté. Et puis devant la porte il y avait Jensen, et ses yeux. Gris. Comme le ciel, dehors, comme le ciel ce jour-là, comme son monde, comme ses yeux à lui. Gabrielle se raidit soudain et sentit un long frisson parcourir son échine, comme une décharge électrique.

Et toi, Jensen, tu ne peux pas deviner à quel point je subis ta présence en ce moment.

Ses doigts vinrent chercher le paquet qui trônait sur la table, évitant habilement la main de son propriétaire, et se saisirent d'une cigarette qu'elle glissa entre ses lèvres en quelques gestes dont elle ne parvenait pas bien à cacher la fébrilité. Quelques braises plus tard et elle laissait échapper déjà ses sombres pensées à travers la fumée qu'elle écarta d'un geste de la main. Ses membres se décrispèrent, ses prunelles cessèrent de s'agiter en tous sens. Les yeux de Jensen redevinrent les yeux de Jensen.
Là. Get the Fuck off, fumer tue et je vous emmerde.


« Si ça peut ne pas te rassurer, j'ai eu le temps de m'amocher autre part qu'au visage, ces dernières semaines. »

Fallait pas rêver. Cigarette ou pas, Gabrielle restait Gabrielle. Seulement, l'ironie qui suintait de ses mots devenait un leurre, destiné à dissimuler son trouble. Et si elle était une gamine intelligente, elle n'en était pas moins une piètre comédienne ... Sa voix cassée déraillait, tressautait, comme parasitée par un nombre indécent de tics nerveux. Elle s'en serait tapé la tête contre les murs. Laissant patiemment la nicotine consumer sa personne en même temps que ses doutes et ses angoisses, Gabrielle ferma les yeux et posa une main sur la table pour sentir les veinures du bois sous sa peau.

« La Fête d'été, hm ... »

Elle sembla réfléchir un instant et jeta un oeil au serveur qui n'allait pas tarder à venir prendre leur commande.

« Pourquoi ce rendez-vous ? »

Ça, c'était une question pertinente.

« Tu tiens vraiment à réincarner Matisse ? »

Ça, peut-être un peu moins. D'autant plus qu'elle se foutait de la réponse. Tout ce qu'elle voulait, c'était qu'il crache le morceau et qu'elle puisse partir. Ses doigts tendus s'accrochèrent à la table, ses ongles enfoncés dans les traits usés du bois. La Fête d'été ... Si seulement elle était restée dans sa chambre ce jour-là. Foutu ennui qui vous poussait à ne faire que des choses insensées. Elle ne voulait pas en parler, elle ne savait même plus ce qu'elle avait pu dire, ou faire. Fumer, ça c'était certain. Boire, aussi. Et c'était surtout ça qui l'inquiétait. Si ce tordu de Jensen l'avait invitée aujourd'hui, il devait bien y avoir une raison ...
Et elle n'était pas bien sûre de vouloir la connaître.
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Elias Jensen
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MessageSujet: Re: Une lettre, des lunettes bleues et trois petits points.   Une lettre, des lunettes bleues et trois petits points. EmptyDim 10 Jan - 0:35

Gabrielle E. Dimitrov. Corbeau à l’extérieur, tigresse à l’intérieur. Tu m’amuses. Ta conversation décalée à la Fête d’Eté m’a étonné. Désormais, je veux en savoir plus sur toi, je veux te prendre dans mes filets l’espace d’une soirée, au bal de Noël. Je vais leur montrer, aux autres, que ce ne sera qu’une formalité, il suffit de savoir s’y prendre. Il ne sera pas dit qu’Elias Jensen a échoué.

Bel optimisme. A sa vue, la jeune fille semblait s’être décomposée. Désormais, elle n’en menait pas large, elle le fixait étrangement comme prête à sauter sur sa proie. Que croyait-elle ? Qu’imaginait-elle ? Il n’en savait rien mais ça n’avait pas l’air bien joyeux. Avait-il fait quoique ce soit de déplacé ? Non... pas encore du moins. Il savait qu’il devrait y aller lentement pour obtenir ce qu’il voulait. Elle avait un tempérament fort, il risquait de s’y cogner, il en était conscient. Les mains dans les poches, elle le regardait de ses yeux bleus déstabilisants, quand allaient éclater la colère et la rage qui bouillonnaient à l’intérieur d’elle-même ? Sans même être devin, le danois crut déceler un éclair sombre dans ses yeux. Elle n’avait pas l’air dans son assiette, elle n’avait pas l’air de vouloir être plus longtemps en sa compagnie. Sa seule personne la dégoutait-il ? Allait-il avoir à faire à une Cinnacrow à la Mélite d’Orcy, qui lui ferait comprendre combien il était insignifiant, combien il salissait l’espèce humaine, et cætera, et cætera ? Non... du moins l’espérait-il. A la Fête d’Eté, il avait cru voir en elle une fille perdue entre deux mondes, une fille cool en réalité, simplement noircie par une rage immense, une colère envers tout, tout le monde. Il fallait dire que le gros con qui l’avait tabassé n’était qu’un mauvais exemple de l’humanité. Pourtant, elle lui était parue sur la défensive, de prime abord. Très réservée concernant elle-même mais ne pesant pas ses mots pour parler des autres et divaguer sur les peintres moldus. Une drôle de fille, oui. Malgré la façon dont elle le fusillait du regard et la crispation qu’exprimait tout son être, il parvenait à se convaincre qu’il avait fait le bon choix.

Elias avait cru que les choses seraient simples. Sans doute ne réalisait-il pas que si dans son esprit, la drague était une chose innée, il pouvait avoir en face de lui un très gros obstacle, une forte répulsion de la part de la Cinnacrow. Avant sa rencontre avec Mélite, il privilégiait souvent les filles faciles, celles qui le regardaient avec beaucoup d’attention et ne pouvaient s’empêcher de lui taper la bise entre deux couloirs, pour montrer aux autres « je le connais ! » et pour lui faire comprendre « je veux être la prochaine ! ». Gabrielle E. Dimitrov devait se contrefoutre de le connaitre. Pire, c’était lui qui voulait en apprendre plus sur elle. Quant à être la prochaine, voilà une dimension qu’il ne cherchait pas encore à prendre en considération. Si on omettait le fait que sa maigreur donnait l’impression qu’elle risquait de sa casser au moindre coup de vent, elle avait un physique particulier, certes, mais plutôt charmant. Ses longs cheveux noirs et ses yeux... ses yeux... rien que pour ses yeux, beaucoup se mettraient en quatre. Mais coucher avec Dimitrov n’était pas encore à l’ordre du jour. Il y avait bien des étapes par lesquelles il devrait passer. Répondre à ce « Je n’ai pas faim. » et à toute sa froideur, tout d’abord.

- Et ben moi si.

Il était bien décidé à ne pas se laisser impressionner par son manque de chaleur et par ce sentiment que traduisait toute l’attitude de la jeune fille : je ne veux pas te voir, je ne veux pas te parler, je ne veux même pas te connaitre. Oui, il donnait l’impression de la séquestrer, presque. Cela ne l’empêchait pas de maintenir un large sourire presqu’insolent. Lui il était bien dans cette Pimentine, il savait qu’il parviendrait à la dérider, d’une manière ou d’une autre. Sa technique des cigarettes serait surement celle qui aurait le plus d’effet, alors il sortit son paquet et le posa au milieu de sa table, tel un Graal tentateur. Il croisa le regard de la jeune fille posé sur lui et attendait une réaction de sa part. Lentement, il vit les doigts de cette dernière s’emparer du paquet et en saisir une qu’elle alluma rapidement.

- Je prends ça pour un oui.

A son tour, il sortit une cigarette qu’il alluma d’un coup de baguette, tout en s’asseyant à la table, avec son habituelle décontraction. A bien regarder ce duo, on repérait combien les deux jeunes gens étaient totalement à l’opposé l’un de l’autre. Elias était tranquille, dans son univers, ouvert à la discussion et souriant alors que la jeune fille, renfermée sur elle-même était droite, raide dans ses gestes et l’observait avec colère. La nicotine sembla faire son effet cependant, et, soufflant de la fumée, elle le dévisagea une nouvelle fois et accepta enfin de lui parler un peu plus. Lui parler... c’était beaucoup dire, elle émit toutefois une remarque, froide, évoquant les semaines passées.

- C’est donc une manie, chez toi, la baston ? Tu veux te réincarner en punching-ball ou t’es du genre à taper la première ?

Expulsant à son tour la fumée, il le regardait d’un air sincèrement intéressé. C’était la première fois qu’il avait à faire à une fille comme ça. Une garçonne qui faisait parler ses poings, s’il en croyait ce qu’il avait entendu dire d’elle, depuis qu’il s’était un peu intéressé à cette dernière. Bon, Mani avait parfois des faux airs de garçon manqué, mais c’était autre chose. Totalement autre chose. Jamais il n’avait essayé de draguer sa demi-sœur - et heureusement -, jamais il ne comptait l’inviter à un bal. De toute façon, elle parvenait toujours à se trouver toute seule une multitude de cavaliers... Devant lui, la Cinnacrow ne s’était toujours pas assise. Elle posa une main sur le bois de la table, en signe d’hésitation. Elle semblait ne pas vraiment comprendre ce qu’elle faisait là, avec lui, au final. Elias était conscient de cela et s’attendait à la question qui ne tarda pas à venir.

- Pourquoi ce rendez-vous ? Parce que j’avais envie. Je ne savais pas qu’il fallait forcément une raison pour discuter avec quelqu’un autour d’un verre et d’un repas.


Une oreille exercée distinguerait sans mal une pointe d’ironie. La Cinnacrow ne serait pas dupe non plus. Pourtant, il ne mentait pas vraiment. Il était là pour discuter, tout simplement. Depuis quand était-ce interdit ? S’il n’avait pas été l’un des Cinq Plumes, aurait-elle été si méfiante ? Certes, elle avait des raisons de douter de sa bonne foi, mais quand même...

Sans répondre tout de suite à la question qu’elle venait de prononcer, il fit un signe à l’un des autres serveurs qui s’approcha :


- Pour moi, ce sera une formule express, pour la miss... une salade niçoise. Et deux bières.

Dans le genre caricatural... Mais elle avait dit qu’elle avait pas faim. Si elle l’appétit venait en discutant, il ne voulait pas avoir sur la conscience quelques kilos en trop. Même si bon, ça ne lui ferait pas forcément du mal. Le serveur s’éloigna après avoir pris la commande et le Plumentine reprit la parole :

- On sait jamais, si tu changes d’avis... Et si ce n’était pas le cas, il aurait encore un peu de place pour la finir, la salade. Il est de ceux qui mangent beaucoup sans jamais grossir, autant en profiter.

Il marqua une pause et la fixa avec attention. Plus d’attention qu’il ne l’avait fait jusque-là, posant ses yeux gris sur les chaque parcelle de son corps, tout en sachant qu’il n’était pas le moins du monde discret. Il s’en foutait. Il ne pouvait s’empêcher de penser qu’elle avait un certain charme, tout de même. Ce n’était pas une redoutable Mélite, mais elle devait faire craquer des cœurs... des cœurs timides n’osant pas l’approcher, certainement, vu comment elle semblait plus adepte des coups que des grands sentiments.

- Ton Matisse semble être un type sympa... tu disais quoi déjà ? « Le rappel des couleurs avec tes mèches bleues fait très ’Matisse’... c’est un signe, non ? Et puis, s’il est mort, faut bien que quelqu’un se charge de le réincarner, non ? J’me dévoue.

Ce qu’il disait n’avait pas vraiment de sens, mais il se souvenait bien de la discussion décousue qui avait suivi les quelques minutes de leur première rencontre. Il trouvait amusant ce décalage entre la dureté du ton qu’employait parfois Gabrielle, la flamme de colère dans ses yeux et son évocation de la peinture, très poétique. Elle lui rappelait un véritable patchwork pas vraiment terminé. Toujours droite devant lui, elle ne semblait pas résignée à pleinement accepter l’invitation. Il eut un soupir amusé et lui lança :

- Allez, assis-toi, j’vais pas te manger.

Peut-être même que c’était elle qui risquait de le mordre... mais ça, il ne le savait pas encore et se permit même, ô grand subtile ! de lui demander :

- Dis-moi plutôt, tu vas au Bal de Noël avec quelqu’un ? Le tout ponctué d’un large sourire charmeur.

C’est bien dans la vie, d’avoir des envies suicidaires.


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Gabrielle E. Dimitrov
A.C.A.I.I
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Gabrielle E. Dimitrov



 
▌Né(e) le: 13 Novembre.
▌Pays d'origine: Corée.
▌Statut: 3ème année

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MessageSujet: Re: Une lettre, des lunettes bleues et trois petits points.   Une lettre, des lunettes bleues et trois petits points. EmptyMer 27 Jan - 22:49

Discuter avec quelqu'un autour d'un verre et d'un repas. Discuter avec Gabrielle autour de deux bières, d'un menu express et d'une salade niçoise. C'était pas pareil, nan, pas du tout pareil. Déjà, Gabrielle et une bière dans le même tableau, c'était tabou. Interdit, forbidden. Un café, c'était ce qu'il lui fallait ... Un bon café chaud, avec du lait et un sucre. Et une petite cuillère, aussi, une cuillère à café. Elle regarderait son reflet déformé sur la surface bombée et puis elle la glisserait dans sa poche, pour la mettre dans son tiroir, quand elle rentrerait chez elle. Rentrer chez elle. Ahah. Là-bas, quelque part dans un coin paumé de la Russie ... Qu'est-ce qui l'attendait, à part sa pauvre mère ? Rien. Une vieille chambre poussièreuse avec un vieux lit poussièreux et un vieux tiroir poussiereux. Vide de surcroît. Elle avait tout emmené dans sa petite valise, de Bolgarski à Kim Heechul, de Kim Heechul à Swyn. Un café, oui, il lui fallait un café.

« Allez, assieds-toi, j’vais pas te manger. »

Il n'avait pas intérêt, ça non. Gabrielle était trop osseuse pour être culinairement intéressante. Exhalant un petit nuage de fumée, la Cinnacrow remua légèrement la tête et prit place sur sa chaise, encore à moitié dans ses pensées. Les dés étaient jetés, alea jacta est, Elias avait gagné la première manche de ce que l'on pouvait considérer comme une bataille où la moindre innatention était fatale. Elle était adepte de l'innatention, Gabrielle. Pas volontairement, cela dit. Certaines fautes lui avaient coûté bien plus qu'un repas avec un clampin aux cheveux blancs ... Et malgré tout, elle continuait d'entasser ses maladresses sur la montagne d'échecs qu'était sa vie.
Elle avait causé des problèmes à tout le monde, depuis toujours. Sa mère, Isaac, Raphaël, sa voisine, le fils de sa voisine ... La cousine dudit fils de ladite voisine, même. Elle n'avait pas causé de problèmes à son père, ça non, elle ne l'avait jamais connu. Mais a combien d'autres ? Les tuiles se succédéaient, allant crescendo, jusqu'à rencontrer le point de culminance, jusqu'à ce que tout explose ... que tout recommence. Comme une roue interminable, un cercle vicieux et infernale, qui la plongeait chaque jour un peu plus dans l'ombre. Qui l'éloignait des autres. Oh, les autres, elle s'en foutait ... Elle s'en foutait tellement. Non, eux elle pouvait bien leur casser les dents, ça ne lui faisait ni chaud ni froid. Mais il y avait les autres, et puis les Autres. Les Autres, c'était Isaac. C'était Raphaël, aussi. C'étaient ceux qui comptaient pour elle, tout simplement. Et à qui elle faisait du mal depuis sa naissance.
Et là, elle devrait écouter cet Elias, ce Jensen, ce brin d'homme, alors qu'il ne représentait rien à ses yeux, si ce n'était une personne comme une autre qui lui avait un jour tendu la main ? - ou des glaçons, c'est du pareil au même. Oui, Gabrielle, ça s'appelle socialiser. Mais tu ne le connais pas, ce mot. Au mieux sa définition dans le disctionnaire. Pour toi, ça ne veut rien dire. C'est con, t'aurais pu être normale, sans cette espèce de malédiction ... Tu ne crois pas, aux malédictions. C'est bon pour les élèves de Spiritisme, ça. La faute à qui, alors ? A toi, à eux ? A la vie ? A cette femme qui te l'a donnée ? A cet homme qui l'a détruite ? A tous en même temps, peut-être. T'y es pas pour rien, toi non plus.
Ta-gueule, ma tête.
Eux aussi, tu les as détruits. Pas entièrement, pas comme toi, mais tu les as détruits. Ils ont souffert, et c'est de ta faute. Oh, il ne te le diront jamais, ils se taisent, ils font semblant ... Mais en voyant ton visage, c'est autre chose qu'ils voient. Tu aurais dû le leur cacher, ce visage, comme tu le caches aux autres. Mais tu es faible. Tu es lâche. Tu es une lâche, Gabrielle. Et tu as peur.
Ta-gueule, j'te dis.
Regarde comme tu te caches, comme tu refuses la vérité, vois comme ...

« La salade pour mademoiselle, le menu express pour monsieur, et voilà les deux bières. »

Son dos se raidit. La salade. Le serveur. Elias.
De quoi il parle, lui, encore ? Un bal de Noël ? C'est quoi cette connerie ?
Ah oui. Ce bal. Pour Noël, logique. La bonne blague. Pourquoi tu souris comme ça, ducon ?

« J'ai une tête à aller à un bal ? », fit-elle en écrasant le reste de sa cigarette sur le cendrier.

C'était à se demander à quoi il pensait. N'importe qui ayant un peu plus d'esprit qu'une huître atteinte de Parkinson aurait deviné la réponse d'un seul regard : Non, Gabrielle n'avait pas une tête à aller à des bals. Elle n'était pas moche, non ... Elle avait un visage particulier, qui trahissait légèrement ses origines asiatiques, plus abîmé qu'il n'aurait dû l'être à un âge où on était encore tout neuf ; un visage qui possédait un certain charme malgré toutes ses traces. Un visage qui avait pour joyaux deux grands yeux bleus, remplis d'un désordre de sentiments enchevêtrés, voilés par une colère dévorante. Elle n'était pas laide, elle n'était pas belle non plus. Elle n'était pas entre les deux. Elle était autre chose. Et sur ce front lisse, ce front autre chose, il était clairement écrit : Va voir ailleurs si j'y suis.
Va voir ailleurs si j'y suis, Elias Jensen, loin de préférence.

Et pourquoi une salade niçoise, putain ? C'est coloré, ça me déprime. J'aimerais que tout soit coloré, ne plus avoir à rencontrer ce gris perpétuel. T'essayerais pas de me consoler, avec cette salade, par hasard ? Parce que c'est raté. Ah, et puis tu fais chier, à la fin ... Tu vois pas que j'ai pas envie de te parler ? Ou si, peut-être. Je sais pas ce que je veux, et je sais même plus ce que je ne veux pas. Va-t-en. Reste. Nan, casse-toi. Reste, tu me fais penser à lui. Va-t-en, je vais pleurer.

Gabrielle releva les yeux de son assiette encore intacte et croisa à nouveau le regard perçant de son Matisse. Le même regard qu'elle avait senti quelques instants plus tôt ; les mêmes yeux gris indiscrets, qui semblaient parcourir chaque centimètre carré de sa peau. Une décharge éléctrique sembla lui faire courber la nuque une seconde. Elle n'aimait pas ce regard ... Vraiment pas. C'était comme une flamme qui la brûlait partout où elle se posait, comme si un seul regard avait suffi à la mettre à nu. Ses yeux bleus durcirent, alors qu'elle tentait d'éviter ce faisceau gênant en tournant la tête. Sans que cette désagréable sensation d'être épiée s'en aille. Sa main partit sans prévenir heurter l'une des bières qui roula sur la table avant de se briser sur le sol avec fracas. Son contenu se déversa lentement sur le parquet.

« Arrête. »

Arrête. Arrête de me regarder. Pas avec ces yeux-là.
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